Nicolas Pegon – Couvre-feu

Du 14 avril au 18 mai 2018

Vernissage le samedi 14 avril

 

Tout le travail de Nicolas Pegon part de constructions d’objets hétéroclites collectés de manière méticuleuse, presque monomaniaque. Vanités, amulettes, statuettes, jouets, objets du quotidien… sont altérés, rassemblés et télescopés dans le dessein de devenir les fétiches de scènes liturgiques atemporelles et universelles. Car il s’agit bien de ça chez Nicolas Pegon, rechercher une forme d’universalité dans l’onirisme et la confrontation culturelle. Mêlant obscène, hérétisme, lyrisme et érotisme dans des poses aussi maniéristes que chamaniques, nul ne peut vraisemblablement dire où se déroulent ces scènes.
« Tout se mélange, car tout peut être mélangé » déclare l’artiste. D’un tracé net à un trait plus abstrait, Nicolas Pegon s’affranchit des normes et des codes du monde extérieur, pour l’intimité retrouvée chez soi après le couvre-feu, espace propice à plus de liberté. S’il a dessiné aussi bien au crayon, au feutre et au stylo à bille, c’est le fusain qui a trouvé ses faveurs: ce dernier lui permet de reproduire l’image photographique et de « sublimer » encore la réalité en se la réappropriant nous dit-il. Le banal y est mystifié, le merveilleux naturalisé. Le réalisme du dessin vient renforcer la vraisemblance des scènes hallucinatoires. Superpositions de couches, de profondeurs et de noirs, la composition est dense à tel point que l’on se surprend et on se plaît à s’y perdre.
Le fusain prend ici toute sa dimension. De noir charbonneux, il refait surface au contact de la matière du support comme si nous étions en présence d’aquarelle ou de médiums divers. Le grattage de la feuille lui permet d’éclaircir et de faire vibrer la matière papier. Le corps dès lors s’y délecte dans tous ses états; madone nimbée de papier aluminium, douche de sculpture au visage d’ange archéologique, petite Sophie scotchée dans un no man’s land abstrait… Il est intéressant d’y ressentir la moindre des surfaces; la douceur de la céramique, la rugosité de la pierre, la brillance des surfaces peintes à l’émail pour recouvrir l’objet. Observons également le fond de chaque dessin. Celui-ci est travaillé avec une volonté de faire vagabonder le regard. Un mur de briques, des carreaux, des fresques, des ombres, sont réalisés comme sujet à part entière. Des micro-narrations se déroulent à l’intérieur même d’une scène globale; le fond et la forme s’y délectent. Chaque détail a son importance. Nous assistons à des scènes de genre semies tragiques, malicieuses et bouleversantes. La poésie englobe le trait de chaque dessin de Nicolas.
Le rapport à la photographie n’est qu’une étape de son travail. Elle vient figer cet instant éphémère. L’artiste devient scénographe; ses modèles se parent de colliers créés pour la prise de vue, les coiffures et les poses sont propres à chaque dessin. Quand il ne travaille par sur le corps, l’artiste crée des maisons de carton, où l’assemblage de jouets d’enfants, d’objets récoltés dans des brocantes, de grigris ou d’objets de famille, viennent composer l’image. Celles-ci seront détruites dès la prise de vue effectuée. Ces maisons/sculptures sont réduites à néant car la seule trace restante de ce mysticisme doit être le dessin. Renversant ainsi les codes classiques, la sculpture vient au service du dessin, alors aboutissement de tout ce processus créatif.
Les œuvres de Nicolas Pegon mélangent dans son genre scénique des symboles et des rituels qui évoquent des fragments cathartiques bien subjectifs. Au regardeur de définir, d’imaginer, d’interpréter l’œuvre et l’histoire qui découlent de ces instants figés dans le fusain.

 

Nicolas Pegon

Communiqué de presse