Du 30 mai au 19 juillet 2013
Vernissage le jeudi 30 mai
« Des passerelles entre street art et art conceptuel: c’est un peu toute l’entreprise du jeune artiste Matthieu Martin, qui trouve dans l’espace public la matière et les problématiques de son travail (…). Le tag comme patrimoine contemporain: on retrouve cette idée chez nombre d’artistes, de Cyprien Gaillard à (…) Franck Scurti (…)… Mais à l’inverse, Matthieu Martin « recouvre » aussi de peinture monochrome grise les doubles pages intérieures de magazines consacrées au graff. Ce n’est pas un geste policier, mais c’est quand même l’idée de faire une pause visuelle, ou d’apporter une touche conceptuelle dans le foisonnement multicolore et le paysage parfois trop saturé des graffs. Entre hommage et retournement. »
Jean-Max Colard
L’Officiel Art
Pour la première exposition personnelle de Matthieu Martin sont réunis des œuvres axées essentiellement autour de la thématique principale de l’espace urbain, jonglant entre sculptures, peintures et vidéo.
Les œuvres se déploient par le bais d’un recours à des gestes simples ou déplacés, toujours en lien avec le contexte d’intervention. Regroupées sous le titre In Cité, clin d’œil à la notion d’In Situ, – Un In-Situ spécifique à la ville- l’exposition invite à regarder la ville comme un immense terrain de jeu à pratiquer et à s’approprier. À cela s’ajoute des retournements et une pratique plus conceptuelle et élargie, interrogeant l’idée de mouvement, le rapport à l’immédiateté du geste, les matériaux et les conditions d’apparition d’œuvres dans l’espace publique.
Un ensemble de pierres obstruent l’entrée. L’installation « Povera mobility » se compose de blocks d’enrochement usuellement employés pour fermer des espaces vacants tel que parkings, terrains vagues afin d’empêcher les gens du voyage de s’installer. Ici, le matériau est envisagé non pas pour ses qualités premières brutes mais pour son sens, sa fonction. Montés sur roulettes, les blocks deviennent à leur tour mobiles, inutiles à leur fonction primaire.
Des magazines sont repeints par des aplats de peintures. À l’origine, ces magazines montrent des graffs et c’est par l’utilisation du même médium que les images sont effacées: la bombe de peinture. Les graffs colorés se retrouvent neutralisés par l’utilisation de la même technique, le même nuancier de couleurs, le même outil… Une recherche exagérée d’unité, qui nous renvoie vers l’extérieur de l’espace d’exposition, dans la rue.
Une vidéo vient amplifier le geste du « repeindre ». Réalisée en Russie à Ekaterinburg lors de la 2nd Ural Biennale, Matthieu a entrepris de restaurer dans ses conditions d’origines une tour monumentale de 35m de hauteur, abandonnée, de l’ère constructiviste (1927). Peindre en blanc, sa couleur d’origine, refaire page blanche, qui devient ici l’étape finale, un degré d’intervention minimale, laissant place à un entre-deux, début ou fin de l’action, gigantisme ou minimalisme. Éternel recommencement… (Il est intéressant de noter que suite à cette intervention ayant réactualisé la tour, celle-ci est aujourd’hui en cours de protection au titre de monument historique et qu’un groupe d’architecte s’est formé et travail aujourd’hui activement à sa réhabilitation). Signe de l’impact que peut avoir sur un environnement une action si simple soit-elle.
Cette tension amenée par une logique simple se retrouve pour finir dans l’œuvre 6999 Chênes. Un projet non-réalisé de commande publique envisagé le déplacement d’un des 7000 chênes plantés par Joseph Beuys lors de la documenta 7, de Kassel vers Caen. Un geste, comme une signature, utilisant le matériau non pas pour ces qualités intrinsèques, mais son sens.
Le travail de Matthieu Martin se conceptualise, agissant avec l’immédiateté et la gestualité du graffeur et pensé et matérialisé avec la retenue formelle et critique du conceptuel.
Avec nos remerciements à l’Entreprise Girard et Fossez &CIE; les services techniques de la ville de Bayeux et l’Entreprise Chatel Transport (Groupe Ziegler).