Marion Bataillard – Créatures

Du 14 octobre au 28 novembre 2017

Vernissage le samedi 14 octobre

 

PRIX MARIN 2016
GRAND PRIX DU SALON DE MONTROUGE 2015 – EXPOSITION DES LAURÉATS AU PALAIS DE TOKYO 2015

La peintre a le goût du portrait et de l’autoportrait: sans se soucier des questions de ressemblance, elle donne à ses modèles une dimension iconique tout en les mettant dans des situations triviales. Dans un face-à-face avec le spectateur, ses tableaux empreints de rigueur et de sensibilité posent un autre regard sur les choses de l’amour et montrent une réalité plus enfouie.

ARTE

Ce que voit la créature

« Je suis accroupie à ses pieds. Je la regarde peindre. Elle me regarde. C’est moi qu’elle peint. Qui a commencé à regarder qui? La peinture de Marion Bataillard invite à s’amuser avec elle. Souvent, c’est un regard direct qui vous provoque, parfois inquisiteur, parfois grimaçant, souvent enjôleur. Elle peint des créatures désirantes, les assujettit à son désir de peintre et nous les rend désirables à travers son regard. Que l’on y jouisse ou que l’on y souffre, nous y prenons part. Les objets aussi invitent au jeu; loin d’être des accessoires ou de simples éléments de décor d’une scène instantanée, ils participent à l’action et en distendent la temporalité, muent l’anecdote en archétype. En face de moi, une créature est agenouillée, un éventail au cul, parmi des os de poulet et les figurines de trois petits cochons hilares. Ses seins sont comme ceux d’une louve. Faire l’animal, manger l’animal, jouer avec l’animal — elle était modèle, la voilà devenue mythe. Plus loin se débat une femme sans tête, à la fois femme-sujet virevoltant et pensant, en proie aux abstractions de son inconscient, et femme-objet sexuel, femme-statue sans visage. Marion me parle de la Melancholia de Cranach, de la déprime du Coco Pops et de la robe en résille bleue qui habillera ce modèle-là. Des lignes droites tranchantes zèbrent la toile, ici d’énormes poutres dont les veines luisent à la lumière, là une esquisse de vasistas, maigre espoir d’issue condamné par des lignes de fuite enchevêtrées. « Fais gaffe aux voisins, ne t’approche pas trop de la fenêtre! » — j’ai oublié un instant que j’avais les seins à l’air. Marion Bataillard me peint. Que voit-elle? Je suis une pose inconfortable, une jupe ouverte comme une traîne, des tatouages grossiers, la fatigue d’une nuit sans sommeil, la canicule dans un atelier mansardé, l’amusement de regarder Marion qui me regarde, mais de ne pas la voir, privée de mes lunettes. D’abord, je ne me reconnais pas. Puis, peu à peu, sur le panneau de bois, je découvre ce qu’elle voit – des contours et des aplats, puis des volumes, le regard que je lui lance, les yeux mi-clos. Un jour, une incursion de couleurs vives, et soudain, l’apparition d’une ouverture, l’idée de mer dans un rectangle aux arêtes aiguës, et puis, le mot, prononcé: Vénus. Me voici devenue troisième personne. Et elle vous regarde. »

Marie Klock
Critique, journaliste

Marion Bataillard

Communiqué de Presse