Jaime Sancorlo – The pledge

29 octobre – 20 novembre 2020

Vernissage le samedi 29 octobre

Exposition personnelle

Une ombre glisse, le décorum est sec, les senteurs de la terre accrues, bruissement étouffé des marionnettes, les ombres chinoises s’impriment sur un drapeau gris américain. Le calme est infime, là où se déploie devant nos yeux le bruit assourdissant des bombes, d’un bond vêtu de basket Nike venant déchirer l’opacité du brouillard des tranchées, les peintures de James Sancorlo se dévoilent. Son oeuvre picturale est basée sur des images en noir et blanc récoltées dans les archives photographiques des premières et secondes guerres mondiales. Après une sélection poussée en forme d’Éditing, où un nombre effarant d’images déroulent sous son regard, instants de témoignages de tristesse et d’horreur, l’artiste en sélectionne certaines en tant que sujet naturel à sa propre résonnance créative. Ces images, toutes lourdes de sens, sont ainsi transformées et peintes sur toile de manière réaliste, plus ou moins détaillée selon les particularités de chacune. Et au moyen de la juxtaposition de divers éléments ou personnages fictifs, incrustés toujours en couleur, il fait converger des échos surréalistes et Pop, qui démontent la formalité des scènes représentées. Le côté grotesque et l’ironie de la situation laissent entrevoir une recherche immersive de l’artiste. On y décèle de la fragilité face à une superposition abrupte, passant du noir et blanc à la couleur, où l’enfance effacée reprend place, où l’innocence bascule face à une réalité de terrain de jeu grandeur nature qu’est la guerre. Et c’est en cela que les peintures de Jaime sont touchantes. Comment est ce possible de rigoler ou de sourire avec tendresse devant ces scènes de guerre. En mettant en tension le fond et la forme, il adoucit le rapport ridicule de cette confrontation. Ne trouvons-nous pas rigolo ce lancé de nains de jardin à la place d’obus qui eux immanquablement vont faire des dégâts terribles. Le comte du petit chaperon rouge et le grand méchant loup est subtilement calqué dans la peinture à l’allégeance de cette jeune fille au parti nazi. Ce saut dans le vide qu’effectue ce jeune soldat basket au pieds, pour lequel nous sommes témoins, au dessus d’une tranchée et passant à l’attaque, n’est-il pas exulté par un slogan publicitaire titre même de l’oeuvre JUST DO IT ! Ces emblèmes pop du début de l’après guerre et des années 80/90 deviennent emblèmes ironiques et ré interprétatifs en écho à la situation à laquelle ils sont confrontés. « Les personnages qui apparaissent dans les scènes que je peins appartiennent à des temps difficiles. Ils sont plongés dans la sphère militaire, fruit ici d’un monde d’adultes. Outre la fascination que je ressens pour ce genre de scènes, je suis profondément intriguée par la manière dont se déroule la métamorphose de pensées de ces individus dans de telles situations (s’il leur fut été permit de redevenir innocents. En intégrant des éléments ludiques et colorés dans la peinture, éléments en couleur irréels et animés) je me réfère à ce monde d’enfant oublié à cet instant précis, cherchant une réflexion sur les circonstances et les motifs de la perte et de cette montée d’innocence. » À travers ces oeuvres, Jaime travaille et fait rythmer la dichotomie entre la barbarie, la logique de la guerre et le rapport aux scénettes enfantines, exultant l’humanité de ces soldats. N’a-t-on pas tous entendu l’histoire de la trêve de Noël où à quelques dizaines de mètres, les Français et les Allemands sortaient de leurs tranchées pour pendant trois jours redevenir des êtres humains… L’emploi de ces figures communes et connues de dessins animés, avec des références aux films animés de la company Disney durant la seconde guerre mondiale et leur double lecture, n’est en rien anodine. Les emblèmes de jeux vidéos apportent un humour certain, une légèreté à la dure réalité du troisième Reich. Ces images prennent alors de l’ampleur dans l’acidité de leurs couleurs qui deviennent à part entière un sujet, désacralisant le sujet de fond la guerre et ses horreurs et cette mort vers laquelle ces jeunes hommes courent… en nike… irréalité peinte nous amenant un sourire malgré tout. L’artiste de manière frontale et subtile amplifie ses oeuvres en leur nommant. Les titres revêtent une importance dans la lecture de chaque oeuvre, au delà de la grille de lecture plastique, ils empaquètent définitivement son propos. Le travail de Jaime ne se résume pas à une simple Joke, il met en place des convergences, il nous amène à penser, à repenser ces moments. Dans la vie réelle, celle qui est peinte en niveau de gris, on ne joue plus aux petits soldats de plombs, on en subit les conséquences. Si la poésie que peint Jaime Sancorlo interpelle, décrit, amorce-t-elle une possible relecture ; nous voici songeur face à ces peintures, qui ne refont pas l’histoire mais qui laisse libre court à des perspectives. Avec des SI, ici peint, on aurait refait le monde et la réalité aurait été tout autre…

ALB

Jaime Sancorlo

Communiqué de Presse